Seiken Shukumine, de son véritable prénom Harunori, est né le 9 décembre 1925 à Arime, dans l’actuelle ville de Nago à Okinawa. Dès l’âge de cinq ans son père, directeur d’école primaire, confie son éducation physique à un pratiquant de karaté, Ankô Sadoyama (1880 - ?). Celui-ci lui fera certes découvrir le Karaté, mais surtout, lui fera commencer à développer ses capacités physiques. À son entrée au collège en 1938, le jeune Shukumine commence à pratiquer le kendô, mais attiré par le karaté, il réussit à se faire admettre comme disciple d’un expert peu connu de karaté, Sokô Kishimoto (1862 - 1945).
Kishimoto qui se targuait de n'avoir jamais eu de maître et d'avoir tout apprit lors de nombreux kake-dameshi (duels) aurait néanmoins, selon certaines sources, été disciple de Bushi Takemura (1814 ? - 1896), lui-même disciple de Tode Sakugawa (1782 - 1862 ?). De part cette filiation, on peut déduire que le style pratiqué par Kishimoto était de type Shuri-te, alors qu’il semble que Sadoyama pratiquait le Naha-te (d’après Shukumine, dans « Karate-do tanren sankagetsu »). Sokô Kishimoto eut également pour disciple Seitoku Higa (1920 - ), par la suite fondateur du Bugeikan et premier président de la Fédération de Karaté et de Kobudo d’Okinawa (Okinawa Karate Kobudô rengô-kai), ainsi que Seiichi Akamine (1920 - 1995), fondateur du karaté Shikan-ryû et pionnier du karaté au Brésil. Quoi qu'il en soit, Seiken Shukumine pratiquait semble-t-il un karaté peu orthodoxe basé plutôt sur l'esquive et des attaques fulgurantes aux points vitaux. Kishimoto disparu au cours de la bataille d’Okinawa en 1945. Seiken Shukumine, alors engagé volontaire dans une escadre de sous-marins de poche suicides (kôryû1) de la marine impériale et basée à Yanai dans la préfecture de Yamaguchi, échappa à une mort certaine grâce à la reddition du Japon.
Après la guerre Seiken Shukumine continua à pratiquer et commença à développer de nouvelles techniques dans le but de créer son propre style de karaté. Après être passé de l’île principale, Honshû, à l’île de kyûshû, il retournera un temps sur son île natale d’Okinawa, pour finalement retourner sur Honshû et s’installer dans la ville d’Itô dans la préfecture de Shizuoka. Il semble qu’il assista un temps un de ses anciens condisciples du temps de Kishimoto, Seiichi en mémoire de Kishimoto, qu’il nomma le Gensei-ryû (玄制流). Le 2 octobre 1955, il participa à une démonstration télévisée de différents styles de karaté, organisée par la chaine NTV (Nippon Television), avec Seiichi Akamine (Gôjû-ryû), Kanki Izumigawa (Gôjû-ryû), Hidetaka.Nishiyama (Shôtôkan), Ryusho Sakagami (Shitô-ryû), Yasuhiro Konishi (Ryôbu-kai). Il y démontrera entre autre le kata Koshokun-dai, ainsi qu’une casse d’un empilement de 34 tuiles couvrantes. En 1955, il obtient le grade de 8e dan kyôshi de la Dai-Nippon Butoku-kai.
Après une dizaine d’année de développement du karaté Gensei-ryû et suite à des divergences, notamment au sujet des règles de compétition, avec les autres styles de karaté qui tentaient alors de se regrouper au sein d’une même organisation (Japan Karate Federation) et sans doute également à cause de dissensions internes2, il décide de quitter le monde du karaté pour créé un nouvel art du budô, qu’il nomme Taido ( Tai : 躰=身+体le corps et l’esprit comme un tout, 道 : la voie). Ainsi le 23 janvier 1965 est fondé l’Association Japonaise de Taido et le Taido-Hon’in (Institut du Taido). Le 19 novembre 1967 est organisé le premier championnat national de Taido, ainsi que le premier championnat national universitaire qui auront lieu ensuite tous les ans jusqu’à l’heure actuelle. En 1983, la Fédération Mondiale de Taido (WTF) est créée et le premier championnat international est organisé à Tokyo en 1984. En 1987 le premier championnat européen de Taido est organisé en Suède et aura lieu ensuite tous les quatre ans. Notons à ce sujet que le 3e championnat d’Europe a été organisé en France, à Angers en 1995. En 1993, le premier championnat du Monde est organisé à Tokyo et aura lui aussi lieu dorénavant tous les quatre ans.
Seiken Shukumine décède le 26 novembre 2001 à son domicile, dans la ville d’Itô, d’un arrêt du cœur, à l’âge de 75 ans.
1. Kôryû ou également kôhyôteki-chôgata : il s’agit d’un sous marin de poche de 26 m de long avec un équipage de 5 hommes, conçu pour la défense finale du Japon vers la fin de la guerre. À l’origine équipé de 2 torpilles, il fût en fait pourvu d’un système d’autodestruction destiné à le faire exploser au contact de sa cible.
2. Il existe aujourd’hui trois organisations différentes de Gensei-ryû : la Fédération Internationale de Karaté Gensei-ryû dirigée par Yasunori Kanai et parainée par la famille Shukumine, la fédération internationale de Gensei-ryû Butokukai, créée par Kunihiko Tosa (né en 1931), et la fédération internationale de Gensei-ryû Seidôkai, fondée par Tetsuo Narikawa (né en 1944). Une autre organisation a également été créée à partir du gensei-ryû : le Genwa-kai de Masatsugu Nangô (de son véritable nom Yôichi Takahashi), auteur de nombreux ouvrage sur le karaté et le budô au Japon.